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LE RENOUVEAU SPIRITUEL DE LA FIN DU XIXe ET DU XXe SIÈCLES

© DROITS RÉSERVÉS COPYRIGHT
HERMANN GIGUÈRE
(QUÉBEC) 2003

Cours sur l'histoire de la spiritualité moderne et contemporaine
par Hermann Giguère
Ébauche de notes de cours provisoire 2/12/98
CHAPITRE VIII

La période qui nous intéresse commence avec la fin du Premier concile du Vatican en 1870

Dans le renouveau spirituel de la fin du XIXe et du XXe siècles il y a deux phares: Thérèse de l'Enfant-Jésus et Charles de Foucauld. Ces deux figures spirituelles ont un impact profond. Nous en reparlerons.

Le renouveau spirituel qui s'amorce est tributaire du réveil spirituel du milieu du XIXe siècle dont nous avons parlé au dernier cours. Le renouveau spirituel de cette époque qui se rend jusqu'à nous va apporter des réponses nouvelles aux besoins du peuple de Dieu. Petità petit la spiritualité va se dégager de sa médiocrité et de sa torpeur et d'un certain étouffement dans les pratiques que nous avons appelées spiritualitébesogneuse. Thérèse de Lisieux a vécu cesentiment d'étouffement dans la spiritualité.

Ce dégagement se fait par un retour à l'Évangile vécu au ras de lavie, débarrassé de tout ce qui s'y était ajouté: pratiques, consignes, exercices... Voilà la caractéristique principale de ce renouveau spirituel du XXe siècle. Cet aspect évangélique se manifeste dans la petite voie de Thérèse et aussi dans l'insistance de Charles de Foucauld sur la vie de Jésus à Nazareth.

Regardons un peu le contexte de notre période qui va de 1870 à aujourd'hui

1. Les principaux changementssociaux

1.1 La population

1.1.1 Accroissement

1.1.2 Émigration

1.2 Les nations

1.2.1 Les états nationaux

1.2.2 Les empires coloniaux

1.3 L'industrialisation

1.3.1 Montée du capitalisme

1.3.2 Les classes sociales

2. Un difficile dialogue

2.1 Problématique: l'Eglisedans le monde moderne

Que devient l'Eglise devant ceschangements sociaux qui s'accélèrent au lieu des'arrêter? l'Eglise doit s'adapter à la sociétéautour d'elle?

Cette question avait déjàété posée au XIXème siècled'une façon brutale et prophétique par Félicitéede Lamennais (1782-1854) qui y apportait une réponse positivedans son ensemble. Ses opinions furent condamnées d'aborden 1832 pour leurs "excès" par GrégoireXVI dans Mirari vos , puis en 1834 celui-ci revint àla charge et condamna Les paroles d'un croyant dans Singularivos comme nous l'avons déjà dit

Le Père Le Guillou o.p. faitle jugement suivant (que j'accepte et fait mien volontiers):

"Avec une conscience quasi prophétiquede l'évolution historique et de la dynamique sociale quiemporte le monde, Lamennais avait senti merveilleusement la façonde penser du monde moderne et sa structure d'action. Il avaitcompris que les conditions de la présence de l'Eglise aumonde nouveau qui s'élaborait étaient la liberté,l'indépendance et la pauvreté. On ne peut que constaterque la déchristianisation' du monde ouvrier coïncidetragiquement avec la condamnation des idées mennaisiennes( article Lamennais dans Dictionnaire de spiritualitécol. 154)

Malgré les condamnations,la question de l'adaptation de l'Eglise dans le monde va continuerde se poser dans tous les domaines: pastoral, dogmatique, scripturaire,social. elle va susciter de durs affrontements, des scissionsmêmes et beaucoup de résignation dans certains cas(Dites qu'ils ont souffert à propos des intellectuels soupçonnésde modernisme comme le Père Lagrange et Blondel). Elletrouvera sa réponse lorsque le virage sera pris complètementavec la Constitution sur l'Eglise dans le monde de ce tempsde Vatican II.

Le P. Louis Le Guillou termine sonarticle sur Lamennais en écrivant:

"Oui, il a fallu attendre - quelquesoit le jugement qu'on porte sur le fait - trois quarts de sièclepour avoir, bon gré, mal gré, dans la tourmenteet la douleur, la séparation de l'Eglise et de l'État.Il a fallu un siècle et demi pour qu'à travers lesterribles crises renanienne et moderniste soit reconnu par leConcile Vatican II la liberté religieuse, et pour que Pacemin terris affirme l'importance du droit naturel". (Ibidemcol. 155)

Voici sommairement les principauxterrains où s'est développé le difficiledialogue.

- Le première est plus pastoralet spirituel et nous le développerons plus longuement,c'est l'américanisme

- le second est plutôt doctrinalet concerne surtout la réflexion théologique etbiblique, c'est le modernisme

- enfin le troisième est plus socialet concerne l'apostolat des laïcs, c'est l'Action catholique

2.2 L'Américanisme

Le dialogue avec le monde moderneva trouver un terrain propice dans l'Amérique du XIXèmesiècle , aux États-Unis où les immigrantsirlandais catholiques, et ceux d'autres nationalités venusd'Europe en masse, entrent de plein pied dans ce monde nouveau,et où, loin de bouder la technique et les valeurs de démocratieet de liberté d'expression, etc., on va s'attacher àprendre sa place dans comme citoyen à part entièredans la cité terrestre et travailler à la construireen solidarité les autres et dans le respect des opinionsdifférentes.

2.2.1 Pour une pastorale adaptéeau monde moderne: le P. Hecker (1819-1888)

Le principal porte-parole de cedialogue ouvert avec le monde nouveau est le Père Isaac-ThomasHecker (1819-1888), appuyé par l'évêque deBaltimore qui est un des premiers diocèses catholiquesdes États-Unis.

Le Père Hecker, d'abord rédemptoristese consacre à la prédication dans sa communauté.Il se sent alors appelé à une implication plus prononcéedans les communications sociales. Avec quelques amis, il va fonderune nouvelle congrégation, les Paulistes ( les prêtresmissionnaires de Saint Paul, , en 1858. Cette congrégations'implique dans la presse et l'édition. Le pèreHecker veut présenter le catholicisme au peuple américaindans sa forme positive, en montrant que le catholicisme est capabled'intégrer les valeurs qui font l'ossature de la sociétéaméricaine. Il voulait manifester les aspects modernesdu catholicisme, pourrait-on dire. Quand il meurt en 1888, aprèsune longue maladie, le cardinal Gibbons, archevêque deBaltimore, écrit:" Peu d'hommes ont fait davantageque le P. Hecker pour servir l'Eglise à leur pays dansune lumière plus favorable et plus exacte". (Dictionnairede Spiritualité, article Hecker col.128)

- La doctrine spirituelle du PèreHecker va insister sur la sanctification dans le quotidien plutôtque sur la séparation du monde. Il veut faire comprendreaux catholiques américains que la sainteté personnelleest aussi importante que la doctrine, si l'on veut que le catholicismesoit respecté dans un pays où la Bible est au coeurde la vie des citoyens et où les groupes religieux fondamentalistes,puritains et sévères pullulent. Dans un sermon sursaint Joseph, qu'il voit comme un modèle d'intégrationdans le monde, il dira:

"Bien qu'il y ait d'aujourd'hui desmartyrs, des ermites et des communautés monastiques, ilest peu probable qu'ils représentent les types dominantsde perfection chrétienne pour notre temps. De nos jours,on vit dans les centre commerciaux, les ateliers, les sociétésde toutes sorte et les diverses relations entre hommes; c'estlà qu'il s'agit d'introduire la sainteté" (Ibidemcol 129)

- Influencé par l'écoledu Père Louis Lallemant, il va prôner l'importancede la docilité et de la fidélité àl'action de l'Esprit saint.

"Cette présence plus intensedu Saint-Esprit est possible et à la portée de tous.Elle n'exige pas de miracles, pas événements extraordinaires,pas de mesures spéciales ni de moyens nouveaux, aucuneperturbation dans les occupations de tous les jours; elle exigesimplement que l'âme fasse de plus en plus attention àl'action du Saint-Esprit et qu'elle soit de plus en plus fidèleà ses inspirations. Ce qui ne peut manquer de se produiredes que l'on comprend l'importance, le caractère véritable,les joies et les fruits de ce règne intérieur"(Ibidem, col. 129)

Le Père Hecker a eu beaucoupde succès. Beaucoup de prêtres et plusieurs évêquesle suivaient dans cette voie. Sa perspective a continuéd'inspirer les catholiques américains après sa mort.Il est toujours demeuré attaché à l'Eglise.Sa doctrine spirituelle est demeurée saine et son expériencepersonnelle est celle d'un mystique authentique. Mais, une controverses'est développée en Europe après sa mortà l'occasion de la parution d'une biographie du PèreHecker qui a amené le pape Léon XIII à condamnerune hérésie spirituelle qu'il a appelé l'américanisme,mais qui en pratique a peu à faire avec l'enseignementet la doctrine du P. Hecker.

2.2.2 La controverse en Europe

Après la mort du P. Heckeren 1888, une biographie est publiée en Europe par un deses admirateurs, le P. Klein, en 1897. Le P. Hecker y est présentécomme un apôtre des temps modernes. Dans le contexte européen,on ne comprend pas cette attitude d'ouverture à la démocratie,à la liberté d'expression. Ainsi, se met en branleune campagne des catholiques conservateurs contre les valeursaméricaines. Le P. Charles Maignen met le feu aux poudrespar une série d'articles qu'il rassemble en mai 1898 dansun livre intitulé: Le Père Hecker est-il un saint?Pour eux l'américanisme est l'amour exagéréd'un catholique américain envers son pays qui risque d'entraînersur une mauvaise pente par l'acceptation de valeurs étrangèresau catholicisme. C'est alors que le Pape, pour calmer les esprits,condamnera dans une lettre adressée au cardinal Gibbons,Testem benevolentiae, le 22 janvier 1899 une séried'affirmations fausses sans pour autant dire en aucun endroitde sa lettre qu'elles avaient été soutenues parle P. Hecker.

Le pape condamnait

- une trop grand indulgence envers lesautres en matière de doctrine et de discipline qui risquaitde faire perdre de vue l'originalité du catholicisme parmiles autres confession religieuses

- une mésestime de la directionspirituelle au profit de l'illumination intérieur de l'EspritSaint

- une exaltation exagéréedes vertus dites actives comme l'audace et la force au détrimentdes vertus dites passives comme l'humilité, la patienceou encore des vertus naturelles comme la sociabilité audétriment des vertus surnaturelles comme la charitéthéologale.

- une dépréciation des voeux de religion au profit de promesses qui ne lient pas pour la vieet de solidarités avec ses frères et ses soeurssans promesses.

La lettre de Léon XIII futreçu comme un camouflet par le cardinal Gibbons qui danssa réponse au pape rappela aucun catholique américaincultivé n'avait jamais soutenu les doctrines condamnées.Cette réponse fut acceptée par Rome, mais ne futjamais publiée du vivant du cardinal.

2.2.3 Interprétation

Les évêques américainsne se sont pas sentis visés par cette condamnation et celan'a pas influencé leur pastorale. Ce sont plutôtdes querelles européennes causées par les anti-républicains,les royalistes et les conservateurs, etc. qui ont amenécette lettre de Léon XIII.

a) Le théologien MacAvoydans Concilium no 27 (1976) reprend à son compte le jugementdu P. Klein qui dans son autobiographie en 1949 traitait l'américanismed'hérésie fantôme, car ces doctrines telleque décrites dans la lettre du pape n'avaient étéprônées par personne en ce temps-là.

b) La lettre papale a servi àmettre fin à une controverse en Europe, mais n'a pas misfin aux essais commencées dans la pastorale et la spiritualité.

c) En pratique, les disciples duP. Hecker vont triompher avec le développement d'une spiritualitémoderne beaucoup plus centrée sur les laïcs dans leurétat de vie où le travail et les soucis de la famillesont le lot quotidien et demandent une sanctification dans lequotidien. C'est celle-ci qui se révélera la plusadaptée à l'homme moderne... et qui recevra sa consécrationau Concile Vatican II dans la Constitution sur l'Eglise au chapitreVI sur la vocation universelle à la sainteté ( nos40 et ss).

2.3 Le modernisme

Un autre terrain d'affrontement,le mot n'est pas trop fort, fut celui de la doctrine elle-même,de la réflexion théologique et biblique notamment.

Le modernisme a étél'objet d'une condamnation du pape Pie X dans Pascendi en septembre1907 et par la suite tout le personnel de l'Eglise qui étaitappelé à exercé un ministère quelconqued'enseignement sera tenu de prêter le serment anti-modernistequi réfutait les erreurs du modernisme.

Ce mouvement du modernisme, malgréces condamnations, n'est pas facile à circonscrire. C'estun mouvement polymorphe qui comprend plusieurs expressions etmanifestations. On pourrait les ramener aux trois domaines suivants:

- tentative de rapprocher l'Eglise et lasociété

- tentative de rapprocher la foi de laculture moderne

- et enfin tentative d'adapter la théologieet l'exégèse aux méthodes scientifiques quise développent.

On le voit les manifestations dece mouvement touchent le domaine social, celui des recherchessur l'Écriture et la théologie comme telle. Le modernismene touchera que de façon indirecte la pastorale et la spiritualité.

La réaction anti-modernismeva rendre difficiles pendant plusieurs année le développementnotamment des études scientifiques de la Bible chez lescatholiques. Le P. Lagrange réussira à mettre surpied l'École biblique de Jérusalem cependant, maisil faudra attendre l'encyclique Divino afflante spiritu de PieXII pour que les méthodes scientifiques modernes soientacceptées définitivement en 1947. Du côtéde la spiritualité, on développera une réserveà employer un terme comme expérience pour parlerde la vie spirituelle par peur de sombrer dans le relativise reprochéaux modernistes. C'est le théologien Jean Mouroux qui lepremière en 1948 osera réhabiliter la notion expériencedans la théologie spirituelle dans un ouvrage célèbreintitulé L'expérience chrétienne. Mais ilfaudra attendre encore vingt ans avant qu'un pape utilise ce mot,ce que fera pour la première fois depuis la condamnationdu modernisme la pape Paul VI en 1967.

2.4 L'Action catholique (1925)

Dans la recherche de dialogue avecle monde moderne, un jeune vicaire belge, fils d'ouvrier, va êtrel'instigateur d'une forme d'apostolat tout à fait nouvellequi par la suite va s'étendre à toutes les classessociales.

Il s'agit de l'abbé Cardijn,fait cardinal à la fin de sa vie, qui fonde la Jeunesseouvrière catholique en 1925. Il sera imité en Franceà Clichy, dans la banlieue de Paris par l'abbé Guérinen 1926. Cette nouvelle méthode sera importée deBelgique au Canada entre 1927 et 1930 par Mgr Gauthier, auxiliaireà Montréal et par le Père Henri Roy o.m.i..L'abbé Cardijn viendra consolider les nouveaux groupementsen 1931.

Mais quelle est cette nouvelle méthode?

En résumé, on pourraitdire que "la grande innovation de l'abbé Cardijn estde comprendre que le religion ne peut pas être apportéeà la classe ouvrière par une autre classe, commele croient les oeuvres traditionnelles, la classe ouvrièrea conquis son indépendance spirituelle; sa renaissancereligieuse sera donc impossible tant qu'on la tentera de l'extérieur"(Dansette dans Destin du catholicisme français.... p.50

Cette intuition de Cardijn prendraforme dans un slogan "L'évangélisation du semblablepar le semblable". approuvé par le Pape Pie XI, lesgroupes d'Action catholique seront le milieu où va naîtreune spiritualité nouvelle adaptée aux laïcs.Leur méthode du voir, juger, agir amènera s'enrichirade révision de vie, de partages bibliques, et surtout d'uneformation à l'apostolat direct dans le milieu..

3. Le renouveau de la spiritualité

3.1 Grille de lecture

Deux tendances vont se manifester,deux lignes dans lesquelles vont se placer les initiatives dece renouveau spirituel. Elles viennent tenter de combler le fosséentre la spiritualité et la vie qui s'était commeje l'ai dit à partir du XVIIIème siècle.Les deux tendances partagent, en effet, un point commun qui est"la volonté d'embrasser la totalité de l'existence,afin que la foi imprègne 'tout l'homme et tous les hommes'.

Cette orientation [commune] se traduitpar les interventions du magistère (pape, évêques)dans tous les domaines et l'appel à une christianisationde toute la société et de toutes les cultures"(Histoire des chrétiens par Claude Prud'homme, Centurionet Ed. Paulines, Paris, 1992, p. 158). Sous cet arrière-fond

a) Certains catholiques serontplus sensibles à la vie chrétienne dans ses implicationssociales. Ils développeront une attention aux c sociauxinaugurée par l'encyclique de Léon XII Rerumnovarum en 1891. Pour eux "le catholicisme ne conçoitpas une religion vécue par des individus isoléset indifférents à l'organisation de la société"(Prud'homme, ibidem)

b) D'autres seront plus sensiblesà la vie chrétienne dans sa qualité d'expériencede relation personnelle à Dieu, expérience de conversionintérieure. Ces chrétiens sont plus centréssur l'expérience personnelle de l'Évangile dansleur vie. Les implications sociales en termes d'adaptation, viennenten second. Ils veulent d'abord faire l'unité et l'harmoniede leur vie et de leur relation avec Dieu. Thérèsede Lisieux et Charles de Foucauld sont dans cette ligne. AussiJean Vanier, Thérèse de Calcutta...Nous suivronsdans les pages qui suivent cette deuxième cohorte d'hommeset de femmes qui ont illustrés l'histoire de la spiritualitécontemporaine. La sainteté ne se limité pas àeux et à elles. Plusieurs autres saints ont marquésde leur empreinte notre siècle. Les nombreuses béatificationet canonisations de Jean-Paul II l'illustrent de façonéclatante. Pour nous, il faut nous limiter aux figuresspirituelles qui ont eu le plus d'influence et qui ont laissédes traces plus visibles dans l'Eglise. Au premier rang de cestémoins hors pair, je dirais, figurent Thérèsede l'Enfant-Jésus et Charles de Foucauld. Avant de lesprésenter de façon plus particulière, regardonsquelles sont les tendances de la spiritualité au XXèmesiècle avant Vatican II.

3.2 Tendances de la spiritualitédu XXème siècle avant Vatican II (Caractèresde ce renouveau spirituel)

Dans le contexte ecclésialdes années de la fin du XIXème siècle etjusqu'à Vatican II (1962-1965), il y a cinq tendances ànoter.

3.2.1 Spiritualité apostolique

On commence à s'éloignerd'une spiritualité centrée sur l'intérioritéseulement. La spiritualité doit nourrir la vie apostoliqueet elle doit aussi se manifester dans des oeuvres, des gestesde charité et d'entraide. Le vrai chrétien est celuiqui s'engage, qui s'impliques dans des oeuvres concrètes

En effet, avec le vingtièmesiècle, l'Eglise a commencé à s'adapter àla société industrielle qui se développe. Le clergé commence à changer ses méthodespastorales. Il s'occupe des oeuvres et non seulement des paroisses. Jusqu'en 1925, il y a une floraison d'oeuvres catholiques detoutes sortes:

Les patronages de Saint-Vincentde Paul.

Des oeuvres de presse, tracts, revues.

Des associations de bienfaisance,dames patronnesses, etc.

Des universités, institutscatholiques en France, des écoles catholiques, l'enseignementlibre, l'enseignement privé, etc.

Le livre de Dom Chautard: L'âmede tout apostolat a été écrit àcette époque, signe de ce courant. Il servira de manuelpour les chrétiens engagés pendant de nombreusesdécennies. Nous en dirons un mot plus loin.

Vers la fin des annéesvingt, cette façade de chrétienté àtravers des oeuvres n'a pas empêché la déchristianisation. On est surpris que toute la classe ouvrière décrochede l'Eglise. Il y a une prise de conscience de la déchristianisationet de la sécularisation en Europe et en France.

L'Action catholique, néeen 1925, fait des efforts pour trouver des solutions nouvelles. Les prêtres ouvriers après ;a Deuxième guerremondiale, à la fin des années quarante et dans lesannées cinquante, tentent un renouveau de l'évangélisation.Cet effort avait été inspiré en grande partiepar le livre des abbés Godin et Daniel intituléFrance, pays de mission. Ce livre provoque un réveilde épiscopat et des chrétiens. On a aussi le livrede Gilbert Cesbron: "Les saints vont en enfer".

Au Canada et au Québec, cebesoin apparaît seulement dans les années 1970-1980. Les volumes de Jacques Grand'maison en font état. Ici,la sécularisation ne date que de la révolution tranquille. On a vécu une accélération de ce côtéqui nous met au même niveau que les autres pays.

Avant, le Québec avait unstyle de chrétienté. l'Eglise était mêléeà la société, avait le contrôle del'éducation et des oeuvres sociales.

Cette orientation fut approuvéepar Vatican II dans Gaudium et Spes: l'Eglise dans le monde dece temps.

Elle se prolonge aujourd'hui dansles communautés ecclésiales de base de l'Amériquelatine: C.E.B ., qui furent approuvées à Medellinet confirmées à Puebla.

Aussi dans les luttes de libérationde l'Amérique latine.

Et en Amérique du nord, dansles chrétiens de gauche, chrétiens pour une Églisepopulaire.

Mais là, cette tendance socialen'est pas exclusive. Mgr Helder Camara, évêque deRecife au Brésil, dans son livre: Renouveau et servicede l'homme, écrit avec le cardinal Suenens.

Tout cela est nourri de bien d'autresmouvements: mouvement liturgique qui est concomitant; mouvementbiblique.

3.2.2 Renaissance de l'intérêtpour la mystique

Petit à petit se manifesteun intérêt nouveau pour la mystique. Il commencedans les cercles des érudits et des intellectuels (HenriBergson, Gabriel Marcel, le Père Maréchal, HenriBrémond, Jacques et Raïssa Maritain...). Plusieursétudes naissent à cette époque. Elles apportentune lecture renouvelé du fait mystique. On s'intéressessurtout aux phénomènes mystiques et on essaie d'apporterle point de vue des sciences expérimentales.

Ces réflexions amènentà faire de plus en plus de place dans les étudesthéologiques à la mystique.

Malgré tout une certaineréserve demeure dans les milieux ecclésiastiqueset ce ne sera que dans les années soixante et soixante-et-dixque le déblocage complet se fera.

3.2.3 Évangélisme

Ce terme d'évangélismene réfère pas d'abord à une écolede spiritualité en particulier.

Il indique d'abord un intérêtpour la personne de Jésus qui est en grande partie suscitépar les études exégétiques. Les vies de Jésus(Renan, Loisy, P. Berthe, François Mauriac etc..) pullulentpendant toute la première moitié du siècle.

En second lieu, il exprime un désirde simplicité. En effet, revenir à l'Évangile,c'est laisser de côté un grand nombre de pratiquequi se sont accumulées au cours des siècles et quialourdissent pour ne pas dire qui asphyxie l'expériencespirituelle. Thérèse de l'Enfant-Jésus avécu cet étouffement et c'est de là qu'estvenu la découverte de la "petite voie", Quelquechose de semblable s'est produit pour Charles de Foucauld danssa recherche de l'imitation du Jésus, en particulier desa vie à Nazareth.

3.2.4 Retour aux sources bibliques

Il y a un retour à l'Écriturequi est caractéristique du vingtième siècle. Le mouvement biblique, surtout à partir de 1910 prendson envol à travers toutes sortes de difficultéscomme nous l'avons souligné à propos du modernisme.L'Institut biblique est créé à Rome sousla responsabilité des Jésuites et l'Écolebiblique à Jérusalem avec le Père JosephLagrange sous la responsabilité des Dominicains.

Le retour à l'Écriturese manifeste dans Les éditions de textes et la diffusionde la Bible qui se développent, par des cercles d'étudesbibliques dans les groupes d'Action catholique notamment, dansla prédication et la catéchèse. Le concileVatican II apportera comme une consécration à cettetendance et l'amplifiera.

3.2.5 Inspiration liturgique

Cela commence au début duXIXe siècle avec Dom Guéranger. Le mouvement liturgiqueva se développer. Il y a les abbayes du Mont Césaret de Solesmes. En Allemagne, le mouvement liturgique est trèsfort.

Le but première du mouvementliturgique ainsi amorcé est de rapprocher la piétéde sa source profonde: la liturgie. Pour y arriver on développeradivers moyens.

a) On va favoriser la participationdes fidèles. Pie X et la communion à sept ans. On va mettre des missels ou paroissiens entre les mains des fidèles.

b) On va promouvoir le développementdu chant dans l'assemblée.

c) A Vatican II, on simplifie lesrites et on permet l'usage de la langue vernaculaire au lieu dulatin.

4. Écrivains et personnagesspirituels

4.1 Thérèse del'Enfant-Jésus (1873-1897)

4.1.1 La question thérésienne

Il y a eu en ce qui la concerneun rayonnement particulier et une difficulté de bien percevoirson visage. D'une part, elle se pose à cause de son rayonnement:morte le trente septembre 1897 elle fut béatifiéele vingt-neuf avril 1923. Elle aurait eu environ cinquante-cinqans. Elle fut canonisée le dix-sept mai 1925.

a) Diffusion

Elle se manifeste dans les éditionsde son autobiographie appelée à ce moment: Histoired'une âme. Un an après sa mort, deux mille exemplairessont diffusés. Quinze ans après sa mort, deux centonze mille exemplaires. Pour sa vie abrégée: septcent dix mille exemplaires.

Quinze ans après sa mort,le monastère de Lisieux recevait de huit cents àmille lettres par jour. Elle a apporté une libérationau peuple chrétien.

b) Interprétation

Cette libération du peuplechrétien qui a trouvé en Thérèse unmodèle et une voie: la sainteté à la portéede tout le monde. Cf. Jean-François Six page 17: pourune part, le génie organisateur de Pauline, sa soeur (MèreAgnès de Jésus) prieure du Carmel, y est pour quelquechose dans la diffusion. Elle prenait ses dernières parolessur un calepin et a propagé sa biographie: Histoire d'uneâme.

Mais l'aspect le plus important,la mission de Thérèse, c'est de découvrirau peuple que la voie de la sainteté est à tous.

4.1.2 Cinq périodes danssa vie

Thérèse a vécubeaucoup de difficultés psychologiques. Dernièreenfant de la famille, elle reçoit le nom d'un enfant mort. Elle est orpheline de sa mère à quatre ans, etson père finit sa vie dans une maison de santé mentaleaprès avoir fait des fugues qui causèrent de vivesinquiétudes.

a) Une première rupturepsychologique s'opère à la mort de sa mèrele vingt-huit août 1877. Elle choisit Pauline comme secondemère. Cette période va de sa naissance en 1873jusqu'à la mort de sa mère.

b) Cette période se termineavec la grâce de Noël 1886, grâce qu'elle appellesa conversion. Avant, elle avait des difficultés psychologiques,avait été malade, etc. Thérèse atreize ans et sa stabilité psychologique prend forme àsa conversion.

c) Cette période commenceà treize ans, au moment de sa stabilisation affective.

d) Cette période commenceà quinze ans, après la permission d'entrer au Carmelen 1888.

e) Cette période commencele jeudi-saint ou dimanche de Pâque, deux avril 1896, datede sa première hémoptysie. C'est la nuit de lafoi. Elle découvre le sens de sa mission. Cela durerajusqu'à sa mort le trente septembre 1897. Son itinérairespirituel est lié à ces étapes. Cf. La passionde Thérèse de Lisieux, par le Père Gaucher.

4.1.3 Sa doctrine spirituelle

Il faut la placer dans son contextehistorique. Sa doctrine est centrée autour de la petitevoie. Elle en parle ainsi. Dans la prédication, on parlede la voie d'enfance spirituelle, mais cette expression n'estpas d'elle.

C'est moins l'aspect de l'enfanceque certaines perceptions vis-à-vis de Dieu. On avaitmis en veilleuse l'action de l'Esprit Saint. Le catholicismeofficiel en France était très affaibli depuis Napoléonau XIXe siècle. On voyait Dieu comme justicier qui récompense,qui demande réparation des offenses. Cela dans la prédicationet la catéchèse.

Plusieurs congrégations fondéesà la fin du XIXe siècle sont vouées àla réparation. On a aussi le thème des âmesvictimes. Le carmel de Lisieux avait mis sous le boisseau l'orientationde Thérèse d'Avila pour s'orienter de plus en plusdu côté de cet aspect réparateur de la prière. Ascèse et mortifications extraordinaires comme la discipline,les chaînettes, les bracelets et autres instruments de pénitence. Ce courant réparateur est représenté parMère Marie de Gonzague.

Thérèse arrive dansce contexte et se sent mal à l'aise. Elle n'a pas de directeurspirituel et peu de conseil. Le Père Pichon est envoyéau Canada. Elle s'est débrouillée en écoutantla Parole de Dieu pour découvrir sa voie, surtout versla fin de sa vie.

Elle va dire qu'elle cherche unevoie d'arrivée à Dieu qui s'oppose à la voiede la crainte. Petit à petit, en lisant surtout 1Co 12,31,"Je vais vous enseigner une voie plus excellente, celle del'amour".

Thérèse va prendrece mot à la lettre pour elle. "Me grandir, c'estimpossible; je dois me supporter avec toutes mes imperfections". Elle cherche un moyen d'aller au ciel par une petite voie biencourte.

4.1.4 Les élémentsprincipaux de cette voie

a) Pour elle, le chemin spirituelqui va à Dieu est un chemin qui est celui de la foi pure.

b) C'est un chemin où l'âmeperçoit sa petitesse, son néant devant Dieu. Acceptationde sa petitesse et de sa misère.

c) Cette voie est petite parceque c'est court et rapide: symbolisme de l'ascenseur.

d) L'âme qui prend ce cheminn'a pas à se grandir par son propre travail. Elle attendet reçoit tout de Dieu, de la miséricorde du Seigneur,non de ses efforts.

e) Par ce chemin, on va répondreau Seigneur dans la vie quotidienne faite de petites actions bienordinaires, faites par amour. C'est une attention au niveau dela vie quotidienne, un souci de vivre l'amour et la charité. Cette voie est à la portée de tout le monde. Lapetite voie de Thérèse n'est pas centréeuniquement sur l'enfance spirituelle. Il ne s'agit pas de devenirdes enfants, ce n'est pas de l'infantilisme spirituel, mais unesainteté pas compliquée.

4.1.5 Les conséquencesde cette petite voie dans la spiritualité de Thérèse

a) Dans la spiritualité,ce ne sont pas les pratiques qui sont à privilégier,mais une disposition du coeur qui nous rend humbles et petitsentre les bras de Dieu, conscients de notre faiblesse et confiantsjusqu'à l'audace en la bonté du Père. Ellel'appelle papa.

Cette disposition sera concrétiséedans la charte de l'amour: faire de son mieux avec de pauvrespetites actions, et pour le reste, avoir confiance que le Seigneurse contente de son impuissance et lui donne tout ce qu'elle nepeut acquérir par elle-même. C'est une spiritualitéd'accueil au don de Dieu.

b) Cette petite voie est baséesur des textes de l'Ancien Testament: Proverbes et Isaïe,plutôt que sur des textes de l'Évangile (si vousne redevenez de petits enfants...) C'est l'aspect de la bontéde Dieu vis-à-vis ceux qui sont petits, plutôt quel'aspect d'enfance spirituelle à acquérir. Thérèsene veut pas devenir petite. Elle sait qu'elle est petite. Etelle prend conscience que Dieu aime ceux qui sont assez petitspour reconnaître qu'ils manquent de quelque chose.

Pour Thérèse, nousn'avons pas à devenir des enfants, mais nous sommes petits. Et c'est là que l'amour de Dieu nous rejoint et nous rencontre. Cf. Conrad Meester, Les mains vides (le plus beau livre).

Conclusion

Thérèse est une personnalitériche qui nous propose une spiritualité forte qui va aucoeur de l'Évangile, mais qui a été desservieaprès 1925-1930 par une présentation mièvreet fleur bleue, qui a caché et occulté le vrai visagede Thérèse, ne serait-ce que dans les photos. Cen'est pas une affaire de "petit enfant", etc. Maisc'est quelque chose de plus théologique et profond.

Elle n'en a pas moins marquéune libération dans le peuple des chrétiens quis'est remis à croire, à son exemple, que la saintetéétait possible pour tous et non seulement pour des âmesd'élite. C'est le message essentiel de Thérèse.



4.2 Charles de Foucauld (1858-1916)

Il est une autre figure comme manifestationde ce renouveau évangélique. Charles de Foucauldest très actuel. Il a été bien servi parle Père Voillaume qui est à l'origine des communautésqui se rattachent à Charles de Foucauld. Il a été béatifié le dimanche 13 novembre 2005, à 10 h, en la basilique Saint-Pierre de Rome, au cours de la messe concélébrée sous la présidence du Cardinal Saraiva Martins.

Il est né en 1858. Aprèsavoir été militaire indiscipliné, il futmis à la porte de l'armée et mis à la portede St-Cyr. Il a été un explorateur. Il a écritun volume technique qui a été couronné parl'Académie française: Reconnaissance au Maroc. C'estun converti qui dans les dernières années de savie a été un ermite au Sahara. Il s'appelle aussiCharles de Jésus. Il est mort le première décembrevers dix-neuf heures du soir, âgé de cinquante-huitans.

4.2.1 L'actualité deCharles de Foucauld

a) Sa radicalité dansl'amour de Jésus

"Je ne puis concevoir l'amourde Jésus sans une ressemblance complète". C'est le leitmotiv de toute sa vie. Il va vivre en Terre saintepour vivre où Jésus a vécu. Il est quelqu'und'entier. Il a été très loin dans la voiemauvaise. Converti, il a été très loin dansla suite de Jésus. Il est sans compromission.

Il a vécu dans le jardindes Clarisses en Palestine, pour vivre comme Jésus. Ilvoulait imiter Jésus de façon radicale, mêmedans sa vie matérielle.

b) Une recherche d'authenticité

Cette recherche d'authenticitélui a fait vivre diverses étapes dans sa vie et nous esttrès proche. Être lui-même dans sa réponseau Seigneur. Palestine, Trappe, prêtre, désert:toujours répondre à la volonté de Dieu.

Il s'est fait suivre et guider parl'abbé Huvelin, vicaire de la paroisse La Madeleine àParis. C'est lui qui l'avait confessé lors de sa conversion.

c) Il est plein de gratuité

Il veut être le premièresillon où les autres vont semer. Il veut faire la pré-évangélisation,la pré-mission chez les Touaregs du désert. Ila conscience d'ouvrir le chemin à d'autres. Aussi il faitdes dictionnaires, etc.

Sa vie illustre cela de façonsymbolique et frappante et sa mort aussi. Il a étéassassiné durant la guerre de 1914-1918 par des clans rivauxdans le désert. Il est mort sans raison apparente, commele grain de blé jeté en terre. C'est confirmédans les familles spirituelles nées après sa mort. Lui n'a pas réussi à fonder rien. Les Petits frèreset les Petites soeurs de Jésus ont vus le jour aprèssa mort.

d) Il est très christocentrique

Le mystère de l'Incarnationle fascine. Il est au coeur de sa spiritualité surtoutdans la vie cachée de Jésus à Nazareth. Celaest proche de Thérèse de l'Enfant-Jésus.

4.2.2 Son itinérairespirituel

a) Sa vie a d'abord un aspect d'instabilitéqui lui vient de sa jeunesse. Orphelin de père et de mère,il est élevé par son grand-père. Il a unevie de jeunesse orageuse, des liaisons et il est mis àla porte de l'armée.

b) Une ténacitéqui ne l'abandonne pas et va le conduire à être lepremière européen à entrer au Maroc, déguiséen Juif, et à faire des croquis géographiques. Cette ténacité va l'amener, dans la recherche dela volonté de Dieu, jusqu'au désert en passant parla Trappe.

Il n'accepte aucun compromis. "Aussitôtque je crus qu'il y avait un Dieu, je compris que je ne pouvaisfaire autrement que de ne vivre que pour lui".

4.2.3 Son message spirituelou sa doctrine

a) Selon lui, la vie chrétienneconsiste à rechercher l'imitation de notre Seigneur "quia tellement pris la dernière place que jamais personnen'a pu la lui ravir".

Pour lui, cette pauvretéqu'il appelle abjection, n'est pas une rupture avec le monde commeles mystiques, mais une insertion dans la condition despauvres gens d'aujourd'hui.

b) Pour lui, la contemplation doitêtre incluse au coeur de toute vie chrétienne, etcette contemplation doit se manifester dans une grande dévotionà l'Eucharistie, la présence réelle. Toutesles fraternités ont une chapelle et des moments d'adorationdevant le Très Saint Sacrement comme lui faisait.

c) Il veut être le Frèreuniversel et il propose de placer au coeur des relationsentre les hommes une amitié attentive, concrète,simple, universelle. Il privilégie l'amitié etle voisinage. Il ne court pas après les gens au loin,mais les laisse venir chez lui. Il a un respect, un amour dela personne devant lui, comme personne. Il est ouvert àtous, sans discrimination. Cela le rend aussi très actuelpour nous.

4.2.4 Sa famille spirituelle

Charles de Foucauld est peut-êtreune des plus importantes influences spirituelles au vingtièmesiècle. Voici sa famille spirituelle et quelques uns deceux qui se réclament de lui

Le Père Voillaume qui l'afait connaître. Son volume: Au coeur des masses, est undes quatre ou cinq volumes spirituels les plus valables au vingtièmesiècle. C'est à mettre au même rang que l'Imitationde Jésus Christ, la Montée du carmel, etc.

Carlo Caretto, Petit frèrede Jésus. Lui aussi l'a fait beaucoup connaître.

Des familles religieuses: les Petitsfrères de Jésus; les Petits frères de l'Évangile;et à Ste-Agnès dans Charlevoix, les Petits frèresde la Croix, nouvelle communauté qui commence avec FrèreMichel Verret (+1997).

Quatre communautés de religieuses:les Petites soeurs de Jésus; les Petites soeurs du Sacré-Coeur;les Petites soeurs de l'Évangile; l'Union des Nazaréennesde Charles de Foucauld. Ce sont des laïques qui s'occupentdes handicapés.

Des associations de prêtres:Jésus Caritas ou union sacerdotale. Monsieur Pierre Gaudettede notre faculté de Théologie en est le directeurnational à Montréal.

Des mouvements: Pas de chair, pasd'os; une association de femmes consacrées: La fraternitéJésus Caritas; le groupe Charles de Foucauld; la fraternitéséculière de Charles de Foucauld, etc.


CHARLES DE FOUCAULD (1858-1916):UN INCROYANT DÉCOUVRE JESUS


Plusieurs ont entendu parler aujourd'huidès Petites Soeurs de Jésus et dès PetitsFrères de Jésus qui vivent dans les quartiers populairesaux Philippines, en Amérique du Sud, en Europe et ici mêmeau Québec. Ces disciples de Charles de Foucauld s'inspirentde celui qui voulut être pour tous le "frèreuniversel", proche dès gens, vivant comme eux, àl'exemple de Jésus qui, à Nazareth, fut un humbleartisan. Charles de Foucauld attire de nombreux jeunes aussi aujourd'hui. Mais qui est donc Charles de Foucauld (ou encore FrèreCharles de Jésus comme il se désignait lui-même)?

Charles naît à Strasbourgen France le 15 septembre 1858. Très tôt orphelinde père et de mère, c'est son grand-pèrequi s'occupe de son éducation et de celle de sa soeur.Charles est une enfant plutôt fermé. A l'âgede 15 ans, il a déjà perdu la foi de son enfance.De 15 à 20 ans, il étudie à Paris, puis ilentre à l'école militaire de St-Cyr. C'est une écoleprestigieuse. Entré 82ème sur 412, il en sort 333èmesur 386. Sa vie d'étudiant est loin d'être une réussite."Égoïsme inouï, écrit-il plus tard,folles dépenses, gourmandise et paresse prenant de tellesproportions qu'elles forment mon trait distinctif et semblentrépugnantes même à mes amis, sensualitéextrême, aucun désir du bien, aucun amour de la vérité,indifférence à tout sauf à ma jouissance..."Il est envoyé en Afrique avec son régiment et ilcontinue cette vie toute centrée sur lui-même.

C'est dans ce contexte que Charlesde Foucauld se donne alors un espèce de défi personnel:parcourir le Maroc, ce aucun européen n'a encore réussià faire. Il se déguise en juif pèlerin etpendant onze mois, il explore le pays . Il fait de nombreux relevéstopographiques et revenu en France, il prépare un livreintitulé Reconnaissance au Maroc qui le rendra célèbrecomme explorateur. Pendant ce temps, il songe à se marier,mais il ne se sent pas prêt. Il se rapproche de sa famille,en particulier de sa cousine Marie de Moitessier qui aura surlui une heureuse influence. Il sent confusément que savie ne le mène nulle part. Ses jugements se modifient peuà peu. Il ne pense plus seulement à jouir de lavie pour lui-même. Cette période de sa jeunesse de20 à 28 ans se termine par une conversion en octobre 1886.Charles raconte lui-même événement àson cousin Henri de Castries plus tard: "Pendant douze ansj'ai vécu sans aucune foi. Rien ne me paraissait assezprouvé; la foi égale avec laquelle on suit dèsreligions si diverses me semblait la condamnation de toutes: moinsqu'aucune celle de mon enfance me semblait admissible avec son1=3 que je ne pouvais me résoudre à poser... Pendantque étais à Paris, faisant imprimer mon voyage auMaroc, je me suis trouvé avec dès personnes trèsintelligentes , très vertueuses et très chrétienneset je me suis dit: 'que peut-être cette religion n'étaitpas absurde'...je me suis mis...à répétercette étrange prière: Mon Dieu, si vous existez,faites que je vous connaisse'..." Dans la suite du récitde sa conversion, Charles raconte les démarches qu'il faitpour s'instruire, puis sa rencontre avec un prêtre , l'abbéHuvelin, qui sera déterminante. "Aussitôt queje crus qu'il y avait un Dieu, je compris que je ne pouvais faireautrement que de ne vivre que pour Lui."

La suite de l'expériencespirituelle de Charles de Foucauld de 28 à 58 ans seraune longue recherche de la meilleure façon pour lui d'êtrede plus en plus un disciple de Jésus. "Je ne puisconcevoir l'amour sans un besoin , un besoin impérieuxde conformité, de ressemblance et surtout de partage detoutes les peines, de toutes les difficultés, de toutesles duretés de la vie..." écrira-t-il en 1897.Ce besoin de conformité et de ressemblance avec Jésusl'amène à entrer d'abord chez les moines trappistesen 1890. Il sera un religieux fervent, mais son désir d'imiterle Christ le pousse à autre chose. Il est autoriséà quitter les Trappistes, et il s'en va vivre àNazareth où Jésus lui-même a vécu.Il est jardinier chez les Clarisses, vit dans la pauvretéet la prière. Il accepte finalement de devenir prêtrepour aller s'établir cette fois dans le désert duSahara à Béni-Abbès. Sa vie d'ermite en estune de travail manuel, d'hospitalité, de rencontres avecles nomades de cette partie du Sahara: les Touaregs. Il apprendleur langue. Il veut préparer par sa vie l'annonce de l'Évangile.Sa mission se précise. Il sera le sillon qu'on creuse etoù d'autres viennent jeter la semence. Frère Charlesne cherche à convertir personne. Il lui suffit d'êtrecomme Jésus au milieu dès plus pauvres. "Monapostolat, dira-t-il, doit être l'apostolat de la bonté...Si l'on me demande pourquoi, je suis doux et bon, je dois dire:'Parce que je suis le serviteur d'un bien plus bon que moi. Sivous saviez combien est bon mon Maître Jésus'."

Frère Charles est assassinéen 1916 à Tamanrasset dans le désert par dèsgens qu'il avait aidé. Sa vie semble inutile aux yeux dèshommes, mais depuis, il a inspiré dès milliers d'hommeset de femmes à devenir eux aussi , elles aussi, dèsdisciples de Jésus. Le message de Frère Charlestourne au tour dès points suivants: 1) la recherche del'imitation de Jésus "qui a tellement pris la dernièreplace que jamais personne n'a pu la lui ravir"; 2) une prièrepétrie au coeur même de la vie qui se manifeste dansune grande dévotion à l'Eucharistie; 3) une amitiéattentive, concrète, simple, universelle avec tous et toutesdans le respect et l'amour de la personne telle qu'elle est sansdiscrimination.


4.3 Quelques figures de maîtresspirituels d'aujourd'hui

Dom Marmion (1858-1923)

Un Irlandais. Prêtre séculierd'abord, il se fit moine ensuite et fut abbé du mont Césaret ensuite de l'abbaye de Maredsous en Belgique. Il a de trèsbons livres.

Albert Peryguère (1883-1959)

Prêtre séculier quialla au désert sur les traces de Charles de Foucauld. Il a une vie d'ermite. Son volume: "Laissez-vous saisirpar le Christ" est extraordinaire.

Pierre Teilhard de Chardin, (1881-1955)

Un paléontologue, Jésuite,mort à New York aux États-Unis. Il est alléen Chine, en Somalie, etc. Il a découvert le sinanthrope. Il a développé une synthèse théologiqueoù le Christ est le centre. Il fut soupçonnédans sa vie et la lecture de ses écrits fut interdite dansles séminaires durant un temps.

Il a un optimisme dans le progrèshumain qui est plus réservé aujourd'hui. Sa popularitéest moins grande aujourd'hui que dans les années cinquante,car on voit que le progrès humain a des inconvénientset ne se fait pas toujours en progressant. On est aujourd'huiplus sensible à l'écologie.

Élisabeth de la Trinité(1880-1906)

Une carmélite néeen 1880 et morte en 1905. Pianiste, elle a des écritsspirituels merveilleux publiés par le Père Philippon. Un de ses livres est: A la gloire de la Trinité.

Jules Monchanin (1895-1957)

C'est un prêtre qui, avecle Père LeSaux a fait du ministère en France puisa quitté son ministère pour aller vivre aux Indes. Il est un des premiers de cette montée vers les Indes,que suivront ensuite les Beatles. Ils vont aux Indes pour retrouverune source, l'inspiration de la spiritualité hindoue. Il fonde un hasram. Il y a un centre Monchanin à Montréalqui est inspiré de son esprit. Rencontre de l'hindouismeavec le christianisme.

Thomas Merton (1915-1968)

Artiste, écrivain américain,né en France et converti. Sa biographie se trouve dansla collection: Les convertis du XXe siècle.

Il est mort électrocutéaccidentellement à Bankok en 1958. Il s'est converti dansla vingtaine. Un dimanche, il était entré dansune église et la voyant pleine, cela lui fut une révélationde ce qu'il cherchait. Il a demandé le baptême. Quatre ou cinq ans plus tard, après un cheminement, ils'est fait trappiste sous le nom de frère Louis. Son abbélui a demandé de continuer à écrire. Nousavons une vingtaine de livres de lui. Il s'intéressaità la rencontre du monachisme oriental et chrétien.

Romano Guardini (1885-1968)

Né en 1885 et mort dans lesannées cinquante. C'est un théologien allemandmême si son nom est italien. Il fut professeur d'universitéet maître spirituel. Il a beaucoup influencé avantet pendant la guerre.

Dietrich Bonhoeffer (1906-1945)

Pasteur luthérien, il futexécuté par un commando SS en Bavière sousle régime nazi. C'est un grand théologien qui aécrit beaucoup d'ouvrages d'éthique. Martin LutherKing est dans sa lignée et le reprend beaucoup.

Taizé (1940- )

Roger Schutz et Max Thurian. Enaoût 1940, ils décident de commencer une communautéoecuménique en Bourgogne, pas loin de Cluny. Les débutsfurent modestes. Toutes les confessions chrétiennes fontpartie de la communauté.

En 1974, ils lancent le conciledes jeunes qui a réuni trente mille jeunes et des représentantsdes Églises chrétiennes. De là partent leslettres au peuple de Dieu. Roger Schutz et surtout Max Thurianont beaucoup écrit.

Leur règle est un exemplede règle de vie très évangélique. C'est le condensé de l'expérience spirituelle desdix premières années. Elle s'inspire de saint Benoît.

Jacques Loew (1908- 1996)

Dominicain, il est un des représentantsdes prêtres ouvriers dans les années quarante-cinquante. Il a écrit: Journal d'une mission ouvrière. Ila fondé une école de spiritualité: Écolede la foi, en Suisse, à Fribourg. Il a vécu auBrésil et y a fondé une communauté: SaintPaul. Il a travaillé comme docker.

Jean Vanier (1928- )

Un Canadien fils du généralGeorges Vanier, ancien gouverneur général du Canada. Il est né en 1928. Militaire et officier de marine en1942. Après la guerre, en 1950, il quitte la marine etfait un doctorat en théologie à l'Institut catholiquede Paris. Quelques années plus tard, il adopte deux handicapéset c'est le début de l'Arche.

Teresa de Calcutta (1910-1998)

Née en 1910 en Yougoslavie. A dix-huit ans, elle entre chez les soeurs de Lorette. Elleva aussitôt travailler aux Indes. Dans les annéesquarante, elle décide de s'occuper des mourants. Ellequitte sa communauté et en fonde une autre. Elle travailledans les bidonvilles de Calcutta. Il y a une branche de contemplativesde Mère Teresa.

Carlo Caretto (1910-1988)

Un président d'action catholiqueitalien qui fut à la tête des mouvements étudiantsen Italie vers 1960-1970. Il s'est très impliquésocialement. Puis il quitte la vie active et va vivre dans ledésert avec les Petits frères de Jésus. Ses "Lettres du désert" sont à lire.

Adrienne Von Speyr (1902-1967)

On va en entendre parler de plusen plus car on commence à publier ses écrits. Femmemariée, médecin, mystique suisse, très prochedu théologien Urs von Balthasar. Elle a une expériencespirituelle intense et des phénomènes mystiquesextraordinaires dans sa vie. Elle était souvent maladeet devint aveugle en 1964.

Elle se convertit. En 1942, ellereçoit les stigmates du Christ et tous les vendredis etla semaine sainte, elle les vit intensément. Son volume:La servante du Seigneur, donne une bonne introduction àsa spiritualité pour la connaître.

Maximilien Kolbe (1894-1941)

Frère mineur polonais, ilfut canonisé à l'été 1982. Il esttrès populaire. Il s'occupait de presse, éditions. Il a donné sa vie pour un père de famille.

5. Le phénomènedes groupes spirituels d'après le  concile, surtoutau Québec

Dans le développement quisuit nous verrons les causes de ce phénomène desnombreux groupes spirituels dans les années 1970-1980. La cause éloignée est le retour de la mystiquequi nous vient du réveil spirituel du XIXe siècletandis que les causes prochaines sont reliées au concileVatican II, à la sécularisation, la perte de latranscendance de Dieu, d'où réaction, à unecertaine faillite de la réforme liturgique ou du moinsde son application et au besoin d'une expression populaire desa foi et de sa piété. On faisait des expériencestrès esthétiques, intellectuelles, correctes, oùle monde ordinaire ne se reconnaissait pas.

Ces mouvements se sont répandusdepuis vingt ans. Ils apportent beaucoup dans la ligne de l'éducationde la foi. Cheminement d'éducation de la foi; renouveaude la prière; apport dans la ligne de l'évangélisation. Cela a donné naissance à beaucoup d'autres mouvements.

Développement

Le renouveau spirituel s'est manifestéde façon percutante par la percée des nouveaux mouvementsspirituels qui se répandaient à vive allure. En1964, le Père Henri Roy o.m.i. fonde La Rencontre.La fin de semaine des "biscums", comme on dit alors,obtient un grand succès dans l'est du Québec eten Nouvelle-Angleterre (Manchester) où le Père Royavait travaillé longtemps, Les Cursillos de cristiandadapparaissent eux aussi en 1964 dans les milieux anglophones àMontréal, Oshawa et Windsor. Le première cursilloen langue française a lieu à Sherbrooke en 1966.Puis, à Montréal un première groupe charismatiquevoit le jour en 1969 et, après le retour du PèreJean-Paul Regimbal de Phoenix (Arizona) où il avait reçule Baptême dans l'Esprit, le Renouveau charismatiquese fait connaître par son ministère à Granbyà partir de 1970. En 1974 a lieu à l'universitéLaval à Québec le première Congrèsfrancophone du Renouveau charismatique qui regroupe environ12,000 personnes. Au même moment les prédicationsde Jean Vanier font connaître son oeuvre et des discipless'emploient à répandre l'Arche (fondéeen 1964 à Trosly-Breuil, en France), puis, les groupesde Foi et Partage se mettent en marche progressivementà la suite de la retraite que Jean Vanier animait en août1968 à Marylake, près de Toronto et, enfin, Foiet Lumière, issu des pèlerinages à Lourdesen compagnie de personnes handicapées que Jean Vanier avaitcommencés en 1965, voit le jour. Dans les annéessoixante-et-dix, Renouement conjugal (Marriage Encounter)obtient un succès immédiat auprès des couplesaprès que des franco-américains l'eurent introduitau Québec en 1975 (ici même à Québecpar un week-end donné au Château Bonne Entente).Depuis 1976, le Chemin néocatéchuménals'est solidement implanté dans environ 60 communautésau Canada.Le phénomène des nouveaux mouvements spirituelspeut englober aussi le renouvellement de mouvements déjàexistants comme par exemple l'Ordre séculier franciscain(Fraternité du Tau à Québec) et lanaissance de nouvelles communautés de vie comme cellesdu Désert et de Myriam Beth'léem.

Un phénomènecomplexe

Pour notre propos "mouvementsspirituels" désigne des ensembles qui regroupent desadhérents motivés par une vision commune de leurexistence de croyant, qui sont aussi fortement marquéset influencés par des personnalités hors du commun(charismatiques), qui font expressément appel aux forcesémotionnelles et qui affichent ouvertement leur adhésionau mouvement . "Nouveau" nous réfère àdes mouvements qui, bien que nés quelques annéesauparavant, ont pris leur expansion dans les années soixantecomme c'est le cas du Chemin néocatéchuménalqui apparaît dans les baraques de Palomeras Altas àMadrid en Espagne entre 1962 et 1964, mais qui connaîtrason essor après son implantation dans la paroisse des SaintsMartyrs canadiens à Rome en 1968 ou encore à desmouvements qui sont apparus depuis le Concile Vatican II commele Renouveau charismatique (né aux États-Unisen 1967).

Le Renouveau charismatiqueest répandu dans 130 pays et compte environ 7.5 millionsde "charismatiques actifs" (personnes qui participentà des activités du Renouveau hebdomadairementou mensuellement) et 60.3 millions de "postcharismatiques"(personnes qui ont fait les Séminaires de la vie dansl'Esprit et qui ont été actifs dans le Renouveaupendant une certain laps de temps), tandis qu'environ 4 millionsde personnes ont fait les Cursillos de Cristiandad. LeChemin néocatéchuménal compte plusde plus 10,000 communautés dans 600 diocèses. Dansle diocèse de Québec, en 1993, on compte 48 groupesde cursillistes qui se réunissent régulièrement(environ 1000 personnes) et plus de 5,000 personnes qui ont faitle Cursillo. Le Renouveau charismatique, quant à lui compte129 groupes de prières qui se rencontrent hebdomadairement(2,850 personnes) et plus de 10,000 personnes qui ont étérejointes par le mouvement dont plusieurs fréquentent lesgroupes de façon sporadique. Le Chemin néocatéchuménalest présent à travers 16 communautés quiregroupent 250 personnes. La Rencontre se retrouve avec25 groupes d'Après-Rencontre (environ 200 personnes), tandisque Chemins d'espérance, une variante de la Rencontreissue de la Maison de retraite Jésus-Ouvrier offre 4 ou5 fins de semaine par année avec un suivi chaque jeudiqui réunit environ 125 personnes. Le Renouement conjugal(Marriage Encounter), après une explosion incroyable(44,336 couples et 695 prêtres avaient fait le week-end en 1979, actuellement au Canada on compte 57,404 couples, 993prêtres et 573 religieux et religieuses qui ont fait leRenouement conjugal), se maintient par ses sessions defin de semaine dans le diocèse (3 par année), suivid'un processus-pont (4 équipes) qui conduit à descommunautés de soutien qui sont actuellement au nombrede 17 (environ 200 personnes). Rencontre-fiancés quis'est développé dans l'esprit de Marriage Encounterdepuis novembre 1977 au Canada et qui en applique les techniquesa donné en 1991-1992 14 fins de semaine dans le diocèsede Québec (700 personnes), suivies de quatre soiréesde ressourcement appelés R-Plus qui ont rassemblé50 couples. Environ cent couples bénévoles contribuentà ces fins de semaine et à ces soirées R-Plus.

Texte développé dansle Recueil de textes et documents pp. 163-169

Animés par la convictionque les signes de l'Esprit continuent de se manifester, mêmesi une certaine morosité s'installe dans notre Église,des milliers de chrétiens et chrétiennes des nouveauxmouvements spirituels se retrouvent assidus à la prière,à la fraction du pain, à l'écoute de la Paroleet à la communion fraternelle. Le temps où l'Égliseet la société au Québec vivaient en symbioseest bien révolu. Le pouvoir d'intégration socialede la religion est beaucoup diminué ou complètementdisparu dans certains secteurs. C'est la présence de petitsgroupes de chrétiens heureux et enthousiastes dans leurfoi qui dans un tel contexte fera surgir au fil du quotidien dansles divers milieux des signes de la présence de l'Esprit.Et alors, souhaitons-le, les gens tout autour se demanderont commel'écrivait Paul VI dans son Exhortation apostoliquesur l'évangélisation au numéro 21: "Pourquoisont-ils ainsi? Pourquoi vivent-ils de la sorte? Qu'est-ce - ouqui est-ce - qui les inspire? Pourquoi sont-ils au milieu de nous?" Ce témoignage d'une vie renouvelée par leChrist est une "geste initial d'évangélisation", car, continue Paul VI, "les questions que voilàseront peut-être les premières que se poseront beaucoupde non-chrétiens, qu'ils soient des gens à qui leChrist n'avait jamais été annoncé, des baptisésnon pratiquants, des gens qui vivent en chrétienté,mais selon des principes nullement chrétiens, ou des gensqui cherchent, non sans souffrance, quelque chose ou Quelqu'unqu'ils devinent sans pouvoir le nommer".

6. Les caractéristiquesde la spiritualité d'après Vatican II

Comme il s'agit de la périodecontemporaine, on ne peut pas en juger de façon historique. Mais voici cinq caractéristiques qui sont assez importanteset assez bien.

a) La spiritualité qui répudiel'individualisme et tend à se développer en cellulesde vie fraternelle. Il y a un aspect communautaire dans l'expériencechrétienne. La spiritualité est traverséepar une aspiration profonde à la vie en communion. vivreensemble l'expérience chrétienne. Ce n'estplus "myself and my God".

Il y a un désir de partage,d'accueil, de rencontre avec d'autres, d'où une floraisonde multiples groupes et communautés de toutes sortes. Le concile des jeunes à Taizé; l'arche de Lanzadel Vasto, (autre que celui de Jean Vanier) qui est un genre deretour à la vie écologique, fraternelle, etc.

Du côté catholique,Jean Vanier. Ici, vers les années 1960, la tour de David. A Nicolet, la communauté du Désert où lesdifférences enrichissent et où les contacts sontplus personnalisés. Même dans les communautésreligieuses, elles se sont regroupées en petites unités.

b) La spiritualité est marquéeaussi par l'insistance sur le mystère de l'Incarnation. En 1940, il y a l'encyclique de Pie XII Mystici Corporis. Oninsiste sur la présence de Jésus Christ dans soncorps mystique. Au centre de leurs préoccupations, ilsmettent l'accent sur l'Incarnation.

Teilhard de Chardin est un représentantde cette spiritualité toute centrée sur le Christ,point Omega. Mouvement cosmique vers le Christ Seigneur qui réconcilietout en lui. Le matériel est assumé par le Christ,par son Incarnation. Pendant les années cinquante, ilinvite à l'engagement dans les réalités terrestreset la transformation du monde. C'est une théologie desréalités terrestres.

c) Une spiritualité quiveut atteindre à une véritable expériencepersonnalisée de la rencontre avec Dieu. La spiritualitéest désireuse de se fonder sur l'expérience. Onva rejeter facilement, parfois trop facilement les cadres étroits,et ce qui apparaît théorique, pour préférerle vécu, l'authenticité. Ce fut très fortdans les années soixante. On a la révision de viedéveloppée par l'action catholique. La méthodede l'action catholique était: voir, juger, agir.

L'expérience retrouve saplace dans la spiritualité et c'est très bien, importantet heureux, malgré tous les risques qui l'accompagnentet les déviations possible, comme par exemple, l'émotionalismeet le sentimentalisme (émotion agréable de célébreren petits groupes, etc.) C'est important parce qu'on l'avaittrop soupçonnée et cette expérience étaitdevenue une spiritualité besogneuse.

d) Une spiritualité quise place sous le souffle de l'Esprit surtout de puis le concileet la prière de Jean XXIII dans laquelle il disait: "Renouvelezen notre époque, vos merveilles comme pour une nouvellePentecôte". Souci de répondre aux appels del'Esprit. De là ont surgi de nombreux groupes:

Une des formes est le renouveaucharismatique. Aussi dans les communautés religieusesqui ont renoncé à beaucoup de formes dépasséesde leur vie religieuse et se sont adaptées dans un sensévangélique.

Aussi dans la popularitédes retraites de toutes sortes, ermitages, lieux de solitude,expérience de désert, mouvements spirituels telsles Focolari fondés en Italie à Trente par ChiaraLubich et les cursillo en Espagne, etc. Le Père Voillaumedisait que c'est une des caractéristiques les plus marquantesde notre époque.

c) Une spiritualité quiredécouvre la prière. Il y a un élan réelvers la prière et la contemplation. Cela fait penser àl'Espagne du XVIIe siècle. Prière plus contemplative,de louange, dégagée de certaines formes traditionnellescomme les neuvaines, le chapelet, etc. Prière créatrice.

La solitude et le désertreprennent leur attrait. Les monastères continuent d'êtredes hauts-lieux. La tradition monastique qui avait disparu dansle protestantisme reparaît avec la fondation de Taizédans le luthéranisme. L'intériorité de l'Orientchrétien attire de plus en plus. La popularitédes icônes qui ont renouvelé l'imagerie religieuse. Celle de la Trinité de Roublev fut l'objet d'attentionspéciale il y a quelques années. Des communautésou associations nouvelles en Europe qui sont inspiréesde l'Orient.

Conclusion

Ces caractéristiques s'appliquentde façon différente selon les pays. Certaines, commel'Esprit Saint, se sont manifestées plus récemment. Il faut retenir que la spiritualité est plurielle, diversifiéedans ses formes d'expression. Quand nous dégageons cescaractéristiques, nous faisons un peu de trahison, de caricature,car on laisse forcément de côté certains aspects.

CONCLUSION GÉNÉRALE

Nous avons parcouru une longue étapedans la tradition spirituelle du Peuple de Dieu. Plus nous avonsavancé, plus nous avons reconnu des visages qui nous ressemblent.

Les semences jetées en terrepar nos devanciers et devancières, chercheurs de Dieu,ont produit leurs en temps voulu. Parfois, les semeurs eux-mêmesont été à même de commencer àrécolter des fruits, parfois, telle le grain de bléqui meurt avant de produire, leur vie a paru au monde comme inutile.Mais des disciples se sont levés par la suite et on trouvédans leur exemple un stimulant et un soutien dans leur recherchede Dieu.

Le cours d'Histoire de la spiritualiténe cherche pas uniquement comme on le disait au début àretracer des faits et des situations historiques, il veut encoreservir à nourrir et soutenir notre marche sur le cheminde la sainteté qui demeure, comme le dit si bien le ConcileVatican II, toujours une appel universel, un appel qui est faità tous et à toutes.

Droits réservés Hermann Giguère (Université Laval) 26 novembre 1998 Dernière mise à jour 29 août 2016

Pour usage privé seulement

A.M.D.G.